2011, un millésime de vigneron
Le millésime 2011 fut marqué par une météo très particulière qui a eu pour conséquence d’inscrire les vendanges de cette année en Bourgogne parmi la liste des six millésimes les plus précoces depuis 300 ans ! Dans ces conditions, on entend dire souvent que ce genre de millésime un peu compliqué est un millésime de vigneron. Pour décrypter cette année un peu particulière, je vous propose la lecture de deux fins observateurs, Jacky Rigaux, universitaire et écrivain, qui a posté son texte sur le blog de Jacques Perrin et Patrick Essa, enseignant et vigneron qui anime le forum degustateurs.com.
Une année viticole particulière en Bourgogne
Pour Jacky Rigaux, « l’année viticole fut très compliquée, avec une climatologie marquée au sceau de l’extrême : trop sec à certains moments, trop chaud à d’autres, trop de pluie pendant un mois… C’est quand ils sont aux risques de ces aléas climatiques que les cépages pinot et chardonnay révèlent leur extraordinaire flexibilité, leur étonnante aptitude à traduire le terroir, mais bien sûr dans les endroits les plus favorables à une viticulture de qualité. »
Pour Patrick Essa, le millésime 2011 ne ressemblait à aucun autre : « on le perçoit nettement, les valeurs dont il fallait tenir compte en 2011 ne renvoyaient pas à nos expériences passées, ou si peu. Elles ne s’assimilaient pas au caniculaire 2003 ou au précoce 2007, non il fallait raisonner avec un esprit ouvert, avec en tête un modèle de vinifications et d’élevage sensiblement différent de ceux de ces dernières années. »
Un millésime compliqué en faveur de la hiérarchie des terroirs…ou pas
Pour Jacky Rigaux, grand défenseur des terroirs dans ses nombreux ouvrages, « le millésime 2011 s’annonce sans doute comme le plus compliqué de ces trente dernières années, mais il vérifie la pertinence de la hiérarchie des parcelles dont la Bourgogne s’est fait le modèle en matière de viticulture de terroir. » Les choix du vigneron ont été essentiels sur les grands terroirs : « cela se jouait au jour près pour certaines parcelles : une vraie viticulture de type « haute couture »… qu’on peut se permettre vu le prix atteint par les Grands Crus de Bourgogne ! »
Pour Patrick Essa la conclusion est différente : »pas facile d’admettre que les crus cette année n’étaient pas plus mûrs que les appellations régionales et que certains raisins de ces dernières étaient même plus aboutis en fin de campagne – quand leurs aînés végétaient - car ils ont bénéficié d’un cycle végétatif retardé. Le terroir n’a pas fait la différence véritablement et cela n’arrive pour ainsi dire jamais ! Les vins de l’année seront donc certainement les vins d’appellations régionales. Bien sûr ils ne seront pas meilleurs que les crus, mais vraiment les valeurs seront nivelées dans les deux couleurs car les indices analytiques qui les caractérisent sont vraiment proches de ceux des crus. 2011 une année pour les « petits ». Une bonne nouvelle pour vous, amateurs de vins excellents à prix sages. Voilà bien un « paradoxe » surprenant. »
Je vous invite à lire dans leur intégralité les deux articles :
En dépit de nos conclusions différentes et de ma critique sur la vision historique et quelque peu romantique de Jacky Rigaux, je constate que nos points de vue se recoupent et sans doute se complètent. N ‘oublions pas qu’il écrit depuis la Cote de Nuits et que je suis dans mes conclusions 2011 encore très proche de mes observations premières de viticulteur de la Côte de Beaune. J’apprécie le travail de Jacky Rigaux et son ancrage dans le temps mais je crois qu’en cette année fondamentale pour les climats des deux côtes, il ne fallait pas forcément les sublimer avec trop d’empressement. Cela n’enlève pas leurs qualités et leur importance naturelle pour la viticulture bourguignonne.